Clubhouse, un réseau social d’un nouveau genre

Créé en mars 2020 par Paul Davison et Rohan Seth, Clubhouse est un réseau social de type voix où les utilisateurs discutent au cours de conférence audio appelée rooms. Alors que les podcasts reviennent sur le devant de la scène, ce nouveau poucet dans l’univers des médias sociaux fait beaucoup parler de lui notamment par la présence d’une communauté plus élitiste comme l’iconique entrepreneur milliardaire Elon Musk, le PDG de Facebook Mark Zuckerberg ou encore Xavier Neil. Ces derniers ont animé des débats publics sur l’application et Musk est allé jusqu’à proposer à Vladimir Poutine de se joindre à lui pour un débat en direct, ce à quoi le cabinet du chef d’Etat russe a manifesté son intérêt, désireux de recevoir plus d’information.  

Le vocal, nouvel outil d’interaction sociale    

Pas de messages, pas de vidéos ni de photos ne sont proposés sur Clubhouse. Le réseau social, toujours en phase de développement et uniquement disponible sur IOS a généré près de 11 millions de téléchargements dans le monde et se vente de comptabiliser 10 millions d’utilisateurs actifs hebdomadaires. Les utilisateurs rejoignent des salles de discussion où ils peuvent écouter, participer et interagir avec d’autres sur des sujets allant du registre technologique au commerce, en passant par des échanges ayant pour sujet le sport ou simplement passer du temps avec d’autres utilisateurs inconnus à l’autre bout du monde.  

Clubhouse étant toujours en phase d’amélioration, les dirigeants ont volontairement limité l’accès à l’application pour ne pas surcharger leurs serveurs, ou bien afin de créer cette perception d’exclusivité et ainsi générer de l’intérêt autour de leur plateforme. En effet, pendant plusieurs mois, les utilisateurs ne jouissaient que de 2 invitations (ou parrainages) destinées à des personnes faisant partie de leur carnet d’adresses. Aujourd’hui, bien que les autorisations aient été élevées à 5 par personne, les aspirants à Clubhouse n’ayant pas eu la chance de se faire parrainer restent nombreux.  

La présence de chefs d’entreprise, de marketeurs, sociologues, économistes, politiciens ou encore certaines célébrités sur l’application qui offre virtuellement une liberté d’expression qui dépend du modérateur présent dans la session génère une certaine intimité entre les protagonistes et une réelle impression de sortir des médias traditionnels (réseaux sociaux compris). Cette modération n’offre pas que des avantages, mais génère une multitude de nouveaux défis à relever. La modération de contenu audio en live est quelque chose de quasi-inédit, car on peut la comparer à ce qui est déjà d’actualité chez des géants du streaming, comme Twitch qui a récemment rendu public son rapport de transparence, sa stratégie et ses outils pour modérer la parole de millions d’utilisateurs. La charte de communauté, véritable texte de loi de la plateforme, peut-être traduit comme le premier niveau de prévention contre les comportements déviants. Ce contrôle est renforcé par une I.A. de détection des comportements malveillants, un système de signalements par les streamers et la possibilité de bloquer du contenu illégale ou internautes par les modérateurs du tchat. Twitch déclare que 95% du contenu posté sur la plateforme durant la seconde partie de l’année 2020 a été filtré par l’IA et des modérateurs sur actifs, ce qui a permis de réduire le nombre de signalements des messages liés au harcèlement de 70%. L’I.A. n’étant pas infaillible, son efficacité reste limitée pour de nombreuses raisons. 

De nouveaux enjeux autour de la modération 

C’est sur la plateforme de partage de vidéos YouTube que l’Intelligence Artificielle a encore fait parler d’elle récemment. En effet, Radić un célèbre vidéaste a vu sa diffusion interrompue et sa vidéo supprimée car le chat a été signalé comme « nuisible et dangereux » alors qu’il diffusait en direct une interview d’un grand joueur d’échec. Ne pouvant obtenir de réponse officielle sur les raisons de cette suppression, des chercheurs et scientifiques ont mis en lumière les failles des algorithmes d’analyses lorsque ceux-ci ne parviennent pas à comprendre le sens contextuel d’une phrase par exemple, car une simple suite de mot « noir » « blanc » et « attaque » lors d’une vidéo portant sur une partie d’échec a réussi à tromper l’algorithme. Ils ajoutent même « Sans un humain dans la boucle, se fier aux prédictions des classificateurs standards sur les discussions d’échecs peut être trompeur ». 

Alors oui, l’I.A. est un outil indispensable de la modération et tend à devenir toujours plus performant mais avec l’arrivée de Clubhouse, la question de la modération se réinvente. Comment mettre en place une modération efficace sur un réseau social où les discussions entre utilisateurs ne passent uniquement que par le vocal ? Contrairement à Clubhouse, les contenus peuvent plus facilement être modérés grâce à AutoMod, l’algorithme de détection des messages malveillants qui a prouvé son efficacité sur la plateforme. Cette modération est plus simple à mettre en place car l’algorithme traite des contenus textuels et il dispose de différents niveaux de filtrages, de la possibilité de bloquer des mots ou expressions et surtout cet outil permet de mettre en suspens un message qui ne respecterait pas les règles du tchat avant validation ou suppression par un modérateur humain. Tout ce travail de modération a lieu sans que cela n’impacte l’expérience communautaire des utilisateurs. Comment mettre en place un système de modération efficace sur des prises de paroles spontanées pour éviter tout ?  

Les salles de conversations audios étant contrôlés par des modérateurs amateurs, il n’est pas rare de voir certains dans des situations délicates, lorsqu’il s’agit de gérer des opinions divergentes sur des sujets de société. « J’étais dans un salon LGBT + quand un animateur a coupé le micro d’une personne de l’audience parce qu’il a considéré ses propos comme problématiques vis-à-vis des personnes transgenres », relate Taz Zammit, dans sa présentation de l’application Clubhouse. 

Les défis à relever sont d’autant plus importants que l’impressionnante variété des sujets ainsi que la facilité avec laquelle un membre de Clubhouse peut créer une « room » qui devient très régulièrement publique et accessible à tous puissent inciter des utilisateurs à créer des conférences autour de sujets incitant à la haine, au racisme ainsi qu’à d’autres méfaits que l’on peut croiser sur de multiples réseaux. 

En France, l’application séduit majoritairement un réseau de professionnels orienté tech & communication. En effet, les entrepreneurs s’y font nombreux et pourraient être vus comme les utilisateurs qui vont potentiellement tourner Clubhouse vers l’ambition de ses fondateurs : une application que l’on utiliserait pour débattre sur une variété de sujets avec des inconnus, des experts mais aussi une application professionnelle qui permettrait de planifier des réunions d’équipes intra- ou interentreprises. L’engouement autour de Clubhouse est immédiat puisque le réseau permet d’intégrer un format podcast qui redevient très en vogue et la possibilité d’interagir facilement avec ses auditeurs.  

Pour conclure, Clubhouse présente beaucoup de potentiel du fait de la pluralité des sujets abordés et du panel de profils variés, le réseau a su profiter de la crise sanitaire pour faire sa place parmi les grands. Alors simple phénomène de mode ou véritable modèle à l’avenir, que deviendra Clubhouse lorsque les utilisateurs retrouveront leur vie normale? Une chose est sûre : La pérennité de l’entreprise sera assurée dès lors où elle aura su répondre favorablement à la question de la modération et de l’utilisation des données personnelles. 

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